Prochaine rencontre Fidesco le 25/06 à Paris

Immersion à Madagascar

Par Martin
Martin, volontaire auprès des Salésiens de Don Bosco, à Betafo – Madagascar

Betafo

Un plongeon en direct dans la mission

Les bruits du quotidien m’étaient bien familiers en France, mais en arrivant en mission, il faut rééduquer ses oreilles, leur apprendre à identifier de nouvelles choses. Alors j’ai trouvé que ce serait amusant de vous partager cela ! Voici donc un mince aperçu, une petite immersion sensitive au milieu des nombreux sons du quotidien, sons qui surprennent, amusent, apaisent, qui dérangent parfois, qui font remonter le temps …

Lieu de mission, paysage à Betafo à Madagascar.

Par un beau matin malagasy

BI BI BI BI … Eh oui, il est déjà 5h45, c’est l’heure. Vous avez le droit à une grasse matinée car nous sommes dimanche. Vous vous levez sans trop attendre pour éteindre cette agréable sonnerie (d’un joli réveil bleu acheté 50 centimes sur le marché de Betafo !) et vous vous habillez chaudement pour faire face à la fraîcheur matinale.

Il vous reste environ une demi-heure de calme, au petit matin, pour lire un peu, confier votre journée au Seigneur, ou dire un chapelet. Dans ce silence, votre oreille attentive est frappée par des sons qui ne lui sont pas familiers.

Les coqs ouvrent le bal, et se répondent en cœur, auxquels s’ajoutent les piaillements des Fodys rouges, les aboiements des chiens errants, le sifflement d’un homme. Puis, une musique se fait entendre. Pendant la saison de l’hiver ont lieu les famadihana à Madagascar, la grande fête familiale de l’exhumation des ancêtres. La fête bat encore son plein après toute une nuit de musique ! Betafo s’éveille : la voisine balaye sa cour de terre battue, le coq du même jardin s’étire les ailes avant de s’égosiller sous la fenêtre où vous vous tenez. Tendez l’oreille … On la distingue à peine, mais il semblerait qu’une charrette à zébu arrive sur la route pavée non loin de la maison. Oui c’est cela ! Elle se rapproche, il s’agit bien de son pas lent et lourd. Un taxibrousse klaxonne, et… sonne la cloche de notre église ! Ça va être l’heure de la messe, elle commence à 6h30.

Vous y êtes ! Tous les dimanches, plus de mille fidèles se pressent à l’église pour assister à la messe, et certains viennent de loin pour cela ! Vous oubliez rapidement l’inconfort du banc sur lequel vous êtes installé, alors pris au milieu de cette foule qui chante Dieu de tout son cœur !

Le chant de la paix du Christ commence. Vos voisins vous prennent la main pour former une grande chaîne sur votre rangée, et vous vous balancez ensemble de gauche à droite au rythme de la musique. Puis le synthétiseur lance le chant de l’agneau de Dieu. Ici, celui qui en joue a rajouté la batterie, ce qui est très fréquent (il y a une multitude de rythmes préenregistrés qu’il peut choisir comme accompagnement, et jouer par-dessus). Au début je n’aimais pas trop, mais je m’y suis fait ! Un prêtre MEP que j’ai rencontré, le père Bertrand, m’avait dit : « Nous les Occidentaux, nous prions avec le silence, les Malagasys avec le chant ».

 

Belle histoire immersion en mission | Madagascar
Belle histoire immersion en mission | Madagascar

 

Après la messe, vous passez au marché pour faire le plein de légumes et prendre un petit morceau de viande pour le repas de midi. Il faut vous faufiler dans les petites ruelles de Betafo. Regardez bien ou vous mettez les pieds car le sol est inégal et les vestiges de route pavée sont parfois traîtres. Lorsque vient la saison des pluies, les rues deviennent parfois un champ de boue. À vos pieds, il y a aussi ces courageuses femmes venues de la brousse pour vendre leur production agricole à la ville (courgettes, tomates, carottes, pommes de terres, patates douces, choux, poireaux, oignons, petits pois, haricots, courges, poivrons, etc.) Elles sont assises par terre, un sac est étalé devant elles, où elles ont disposé leurs légumes.

Tendez bien l’oreille : vous entendez en entrant sur le marché un frémissement de friture. Nombreux sont ceux qui profitent également du marché pour vendre de petites choses à manger. La vendeuse est juste un peu plus loin sur la droite. Par terre, un brasero chauffe une poêle pleine d’huile bouillante, et elle dispose ensuite ses mofo-akondro sur un plateau posé sur une chaise. Malgré la densité de personnes, il n’y a pas un brouhaha assourdissant, et l’ambiance est assez calme. On entend surtout le piétinement des tongs ! Sur votre chemin, certains commerçants ont une petite enceinte portative pour sonoriser leur stand avec de la musique, ou avec de la publicité (une voix électronique fait les louanges d’un médicament miracle). Un vendeur de vêtements annonce les prix : « Arivo ariary ny akanjo kely eee !!! » (mille ariarys les petits vêtements), un autre : «Arivo e, arivo e !!! » (mille). Quelques bribes de discussions : « Atsinanana ny lalana » (le chemin est à l’est) , « Avy aty » (viens ici), « Salama e » (bonjour), « Tsara e » (ça va bien), « Un un » (oui, d’accord), « Roa arivo izany » (ça c’est deux mille), « Manao ahoana » (bonjour, comment ça va ?), « Mankaiza ? » (où vas-tu ?), « Mazoto ary » (intraduisible : sois zélé, bon courage) …

Vous avez terminé vos achats pour le déjeuner, et vous rentrez à la maison. Un cochon sur le chemin hurle à la mort.

Personne n’est en train de l’égorger, on lui attache seulement une corde à la patte, comme une laisse, pour ne pas le perdre dans la rue.

Venant de la cour d’une maison, vous percevez le son caractéristique d’une machine pour battre le riz. En actionnant une pédale comme sur les vieilles machines à coudre, un tambour avec des clous vient fouetter les épis de riz pour en séparer les grains.

Martin partage un moment fraternel avec ceux qu'il est parti servir en mission humanitaire avec Fidesco.

Vient l'heure du déjeuner...

Vous êtes arrivé chez nous ! Il est 11h30. C’est l’heure de préparer le repas.

La voisine est déjà en train de vanner son riz. Équipée d’un grand plateau rond appelé vanne (en métal dans notre région), elle nettoie le riz. Avec des coups de poignets réguliers et secs, elle relève le plateau pour lancer en l’air les grains de riz. Le vent s’occupe de disperser les particules les plus légères (poussière, écorces de riz restantes). Ensuite, elle passe entre ses doigts le riz pour enlever les éventuels cailloux, ou le pady restants (riz avec son écorce). Avant tous les repas, on peut entendre un peu partout ce léger bruit des femmes qui vannent leur riz. La petite Mitia est là elle aussi, la petite fille de Patricia qui a 4 ans. Je crois qu’elle s’amuse avec nos poules !

Cette après-midi, vous décidez de visiter la ville d’Antsirabe. De plus, cela vous permet d’expérimenter vos premiers taxi brousses locaux. Vous vous rendez au stationnement non loin de l’église, où sont garées toutes les voitures qui font la liaison. Il existe deux types de taxi brousses. Les familiales (Peugeot 504 break pour les connaisseurs), et les grosses voitures type Mazda, ou Sprinter. Les familiales sont connues pour être plus rapides : elles font moins d’arrêt car elles ont moins de voyageurs. Normalement la voiture a été conçue pour 7 places (2, 3, et 2), mais une familiale ne part que lorsqu’elle est pleine, c’est à dire 2 passagers sur le siège à droite du chauffeur, 4 sur la banquette du milieu, et trois derrière, sans compter les enfants.

Vous êtes monté à côté du chauffeur, et le taxi brousse est presque plein, le départ est imminent. Votre voisin chantonne, sifflote. Après avoir demandé aux passagers les frais, le chauffeur monte dans la voiture, et claque sa portière. Le moteur que l’on entend depuis le début est celui d’une autre voiture à côté. Pour démarrer, votre voiture aura besoin d’un peu d’aide : deux personnes pour la pousser. Eh oui, beaucoup de ces voitures Betafo-Antsirabe ne peuvent démarrer seules. Mais une fois parties, ça roule. Le chauffeur klaxonne car il y a du monde devant la voiture, demande à ceux qui sont derrière s’ils sont prêts à pousser, puis les fait attendre un peu : il y a une moto qui passe. Il parle un peu (je ne comprends pas tout), les gars derrière commencent à vous faire avancer (la voiture fait beaucoup de bruit dans tous les sens…). Doucement au début, pour n’écraser personne, et au bout de 20 secondes, le moteur se met en branle : vous êtes partis. Vous passez justement à côté d’un cortège de famadihana, avec ses tambours et ses sodina (flûtes malagasys), puis la voie est libre, le chauffeur peut mettre les gaz. Première, seconde, troisième, quatrième … Les trous de la route obligent le chauffeur à zigzaguer pour les éviter lorsque cela est possible. Puis le chauffeur s’arrête. Quelqu’un sur le bord de la route lui a demandé de charger des affaires sur le toit. Il paye un petit quelque chose et le chargement sera ensuite livré à Antsirabe, ou en cours de route. Et c’est reparti ! Vous serez à Antsirabe dans 40 minutes environ.

Belle histoire immersion en mission | Madagascar
Belle histoire immersion en mission | Madagascar
Martin est actuellement en mission avec l'ONG catholique de solidarité internationale Fidesco.

La perspective d'une douce soirée

En fin de journée, vous vous rendez à la bibliothèque des pères. C’est une salle que j’apprécie beaucoup, un vieux parquet qui craque, une grande table au milieu, des vieux livres plein les murs et cette bonne odeur qui leur est propre. Je suis sûr que vous vous y plairez. Orientée plein nord (ce qui ici est le côté ensoleillé), il y fait un peu plus chaud que dans le reste du bâtiment, ce qui est appréciable en hiver.

Vous ouvrez la fenêtre pour faire un peu d’air et vous parvient plus précisément un bruit qui vous intriguait en lisant. Des coups de marteaux ? On dirait des tailleurs de pierres sur le chantier d’une cathédrale… Ce sont les coups de marteau des forgerons ! Dans la rue qui jouxte l’église et le bâtiment des pères, sur une vingtaine de mètres, sont installés quotidiennement ces artisans à même le sol. Ils ont chacun leur foyer, attisé par un soufflet artisanal et leur enclume. Tous les jours, les agriculteurs de toute la ville viennent y faire réparer leurs outils, celui-ci avec sa bêche, celui-là avec ses couteaux, un autre encore avec un outil en tête qu’il voudrait faire faire, etc. Puis un autre bruit attire votre attention. Un objet roulant apparemment, mais différent de la charrette de ce matin. Un peu moins lourd, moins grave. Trop léger pour une charrette à bœuf en tout cas. Ce doit sûrement être l’un de ces chariots à main utilisé pour le transport des marchandises. (Comme un caddie mais en bois, et pouvant porter jusqu’à plusieurs centaines de kilos !) 18h déjà ! C’est la cloche de l’église qui sonne l’angélus.

Pour terminer votre journée de découverte, bienvenue dans le réfectoire des pères, cette grande et haute salle où résonnent facilement les joyeuses voix de la communauté. Si ce soir les pères Ruffin et Jeannot, ainsi que deux séminaristes sont absents, l’ambiance n’en est pas moins chaleureuse, dans ce drôle de mélange linguistique où malagasy, français et italien se côtoient. Vous entendez le joyeux père Venance, directeur de l’école, toujours enflammé, enthousiaste et prêt à rigoler. Le bon père italien Don Maurizio, doyen de la communauté, frappe par sa douceur et sa bonne humeur constante ! Le matin, il n’est pas rare d’entendre sa belle voix grave chantonner joyeusement dans les couloirs, pom pom, pom pom pom. Il y a aussi le père Tantely, un jeune prêtre (ordonné il y a deux ans). Réservé et doux, il porte bien son nom qui veut dire « miel ». Deux séminaristes sont également présents, venus pour aider aux activités de vacances.

Après vous être lavé les mains, commence le bénédicité lancé par le père Venance : « Amin’ny anaran’ny Ray, sy ny Zanaka, sy ny Fanahy Masina » (au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit). Puis, les fourchettes s’agitent, et les discussions reprennent. Au début votre dîner, la discussion tourne autour du programme du lendemain. Les intentions de messe, l’heure de la messe, qui va où pour célébrer (les tournées) etc. Pour les discussions en italien, vous me direz si vous avez compris, mais je ne peux pas vous aider là-dessus !

 

Podcast

Nos anciens volontaires replongent dans leurs souvenirs le temps d’un épisode de podcast à écouter au fond d’un canapé, dans les transports, en cuisine ou ailleurs… À cœur ouvert, ils témoignent de leur mission professionnelle à l’autre bout du monde. Ils vous livrent leurs joies, leurs difficultés mais aussi leurs enseignements. En bref, ils vous racontent tout sur la mission !

Un nouvel épisode disponible chaque mois sur toutes les plateformes d’écoute, n’hésitez pas à vous abonner et à partager notre podcast pour diffuser la joie de la mission ! 🕊

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