Mgr Lhernould – Comme évêque de Constantine et Hippone, le diocèse où vécut saint Augustin au Vème siècle, j’ai la responsabilité de la petite famille catholique du nord-est algérien : un « petit troupeau », selon l’expression affectueuse de Jésus dans l’Évangile (cf. Luc 12,32), de 300 frères et sœurs au plus, dans une région peuplée d’environ 20 millions d’habitants.
Nous faisons appel à des volontaires Fidesco pour êtres témoins, avec leurs frères et sœurs de notre petite Église, de la Bonne Nouvelle. Être témoins que Dieu, en Jésus, désire entrer en relation et se fait proche de chacun pour dire à toute personne, sans distinction : « Tu as du prix à mes yeux, tu as de la valeur et je t’aime ». Dieu qui crée à son image et à sa ressemblance, qui bénit, qui s’abaisse et s’approche, qui embrasse et qui touche, qui relève et qui sauve, qui guérit, qui pardonne : « Notre Dieu est tendresse » (Ps 114,5), et couronne chacun d’amour et de tendresse. Ce témoignage passe d’abord par une manière d’être. Activités et compétences sont bien sûr importantes mais ne viennent qu’en second. Jésus nous dit que si nous le suivons sur le chemin de l’humilité et du service, nous connaîtrons sa joie, qu’elle sera en nous et qu’elle sera parfaite. C’est pour cette joie, reçue et partagée, que nous faisons appel à Fidesco : pour la donner, mais surtout, d’abord, pour la recevoir.
Mgr Lhernould – En Algérie, les habitants sont musulmans à 99,9%. Nous sommes autour de 3000 catholiques, répartis sur quatre diocèses : Alger, Oran, Constantine et Hippone, et Laghouat-Ghardaïa, l’immense diocèse du Sahara. Nous vivons en petites communautés – parfois seulement deux ou trois frères et sœurs dans une ville ou une région. « Priants au milieu d’autres priants », comme aimait le dire le bienheureux Christian de Chergé, le prieur du monastère de Tibhirine décédé en 1996, nous expérimentons ce que Jésus disait lors de son dernier repas : « À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn 13,25). Pauvres, fragiles et tout petits, nous ne cherchons pas à faire nombre mais à faire signe : celui de l’amour de Dieu qui se fait proche et qui s’offre à chacun en prenant la place de celui qui sert.
En Algérie, ni guirlandes ni sapins, aucun de tous ces signes que l’on peut voir en bien d’autres lieux ; mais la vie quotidienne, la simplicité, un ciel rempli d’étoiles, des troupeaux, des bergers comme ceux de Bethléem… Noël comme mystère de silence, centré sur l’essentiel : la venue dans le monde de la Parole faite chair, la naissance de Celui que les prophètes appellent le « Prince de la Paix » (Is 9,5) et la paix en personne. Au désert, on entend tout et mieux. Notre Eglise vit au désert, pas seulement au sens géographique. Et cette situation lui fait entendre de manière très forte le cri de notre monde qui aspire à la paix, le cri des peuples en conflit, le cri des petits et des pauvres, le cri de la planète qu’épuisent bien des modes de vie, le cri de la création qui « attend avec impatience la révélation des fils de Dieu » (Rm 8,19).
Mgr Lhernould – Mgr Paul Desfarges, archevêque émérite d’Alger, qui fut aussi mon prédécesseur à Constantine, aime dire de notre petite Église en Algérie qu’elle est « dans la mangeoire ». Nous n’avons presque rien, nous sommes très peu nombreux… Comme Jésus, qui est né dans une étable, entouré seulement de Marie, de Joseph et de quelques bergers. Mais en présence aussi de l’Église invisible manifestée par les anges, et au milieu d’un peuple de croyants qui ne connaissaient pas encore l’Évangile… La grâce des commencements fut l’humilité du Verbe. Et ce sera la route qu’il vivra jusqu’à l’extrême du don de lui-même par amour pour tous. C’est cette humilité, comme chemin de rencontre, de partage et d’accomplissement que nous essayons de vivre ici, d’une manière radicale car dépouillée de tout. Comme Marie à l’Épiphanie, nous ne faisons souvent qu’accueillir, écouter, recevoir la richesse des personnes, leurs talents, leurs recherches… gardant au cœur les événements, la vie de notre peuple, pour l’offrir humblement sur l’autel de la prière et contribuer ainsi à pétrir de jour en jour la pâte du Royaume.
L’Espérance est une soif universelle, qui ignore souvent sa source. Notre rôle est d’en être serviteurs. Nous le sommes dès lors que nous témoignons que cette source est le Cœur même de Dieu. « Serviteurs de l’Espérance » : c’est le titre que les évêques du Nord de l’Afrique ont choisi pour leur lettre pastorale commune de décembre 2014, dans laquelle ils écrivaient : « Nos Églises portent l’Espérance de la fraternité universelle capable de dépasser et de rendre fécondes toutes les différences. À l’image de Marie au cœur ‘qui écoute et qui accueille’, au cœur ‘qui croit et qui espère’ en Dieu et en l’autre, dans l’abandon confiant renouvelé chaque jour, dans la prière et l’humilité du service, le ‘fiat’ est pour nous chemin de témoignage et de mission. Un ‘fiat’ qui peut conduire jusqu’au mystère de la Croix, là où les soubresauts de l’histoire pourraient laisser penser que la persévérance est une vaine épreuve ».
Podcast
Nos anciens volontaires replongent dans leurs souvenirs le temps d’un épisode de podcast à écouter au fond d’un canapé, dans les transports, en cuisine ou ailleurs… À cœur ouvert, ils témoignent de leur mission professionnelle à l’autre bout du monde. Ils vous livrent leurs joies, leurs difficultés mais aussi leurs enseignements. En bref, ils vous racontent tout sur la mission !
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