Article :Le Courrier de l’Ouest- Niort
Leurs sourires radieux en disent long. Quelque part Grégoire de Lassus, 29 ans et son épouse Jessica, 30 ans, sont déjà partis. Ils ont vendu leur confortable maison dans l’hypercentre de Niort. Ingénieur aéronautique de formation, responsable d’un secteur de production chez Safran, Grégoire a démissionné.
Dès la mi-septembre, si le Covid-19 ne vient pas différer leur départ, ces parents de trois jeunes enfants, Maximilien cinq ans et demi, Hugues, trois ans et demi et Alban dix-huit mois, rejoindront en famille le Bénin. Pas pour y mener une vie d’expatriés. C’est à la ferme-école Laudato Si, à Banigbé que l’ONG Fidesco a choisi de les envoyer œuvrer. «Nous connaissions Fidesco depuis assez longtemps, car nous avons des amis qui sont déjà partis avec cette ONG catholique», confie le couple. «Vivre cette expérience, nous n’y avons pas toujours songé. Il y a seulement deux ans, ce n’était pas du tout d’actualité. Nous pensions que ce n’était pas pour nous. Il nous semblait compliqué de tout quitter, d’abandonner notre confort.»
« On ne fait attention ni aux pauvres, ni à l’environnement » Grégoire et Jessica de Lassus
L’idée de changer de quotidien, d’apprendre à vivre plus sombrement auprès de ceux qui n’ont rien, de se donner davantage va pourtant cheminer. «Les crises écologiques, le changement climatique, le fait que les ressources disparaissent partout, que les océans de plastique s’étendent, que les sols s’appauvrissent ont nourri notre réflexion. On ne peut que s’interroger sur son propre mode de vie. Et se dire qu’on ne fait attention ni aux pauvres, ni à l’environnement.»
Catholiques, Grégoire et Jessica savent que le cap qu’ils s’apprêtent à franchir leur offrira une occasion de mener une vie en adéquation avec leur foi. «Etre au service de ceux qui en ont le plus besoin, c’est le message de Jésus. Nous sommes heureux de pouvoir dire que ce que nous allons faire là-bas va répondre à notre quête de sens», aiment-ils à l’appeler.
A Banigbé, ceux qui en ont le plus besoin sont nombreux. «La ferme dont je serai responsable est un lieu de formation pour les agriculteurs et futurs agriculteurs. On y respecte les principes de la permaculture pour produire des fruits, des légumes et les vendre. Les recettes dégagées sont nécessaires au fonctionnement de l’école primaire jouxtant la ferme», explique Grégoire.
Tout cela doit contribuer à lutter contre l’exode rural, la déscolarisation, la pauvreté.
«Une vingtaine de veuves, elles sont nombreuses en Afrique, viennent régulièrement travailler à la ferme. Elles en tirent un petit revenu», poursuit ce dernier. «Moi je vais m’occuper de ces veuves, les accompagner humainement et je serai la responsable pédagogique de l’école. Les méthodes y sont bienveillantes.»
Maintenant l’heure du départ approche. « Nos enfants sont contents parce que nous le sommes aussi. Nos familles et nos amis comprennent. Ils sont assez admiratifs alors que nous n’avons encore rien fait. Pendant deux ans nous savons que nous ne reviendrons pas en France. Nous ne pouvons pas épouser des conditions de vie proches de celles des locaux et même temps prendre un billet d’avion pour rentrer à Noël. »
OLIVIER CUAU